
Abstention du Groupe Faire Gagner Marseille sur le rapport n°46 présentant l’arrêté du Compte Administratif. Conseil municipal du lundi 21 juin 2010.
INTERVENTION DE SYLVIE ANDRIEUX
Mes chers collègues,
D’après les chiffres de la Direction des Collectivités Locales, notre ville est parmi toutes les grandes métropoles celle qui a le plus augmenté ses impôts depuis 7 ans (+22 %). Le niveau de la taxe d’habitation est à Marseille largement supérieur à la moyenne nationale. Il atteint 26,83% contre 21,3% à Nice ou à Lyon, 18,9% à Aix en Provence et à 9,59% à Paris !
Quant à notre dette, comme vous le savez, elle est l’une des plus élevées de France avec 1,850 milliard € (pour la seule dette communale) soit 2180 € par habitant.
Malgré ce sombre constat, je vous surprendrais peut être en affirmant que je partage pour une fois l’avis de M. Tourret : l’exercice 2009, tel qu’il est décrit dans le compte administratif, est plutôt positif. On constate en effet une bonne maîtrise des dépenses de fonctionnement, un maintien du niveau des investissements par rapport à 2008 et surtout une stabilisation de notre endettement, ce qui est la priorité des priorités dans le contexte actuel.
Avec une épargne brute qui avoisine 100 millions et un endettement de 1,8 milliard d’euros, notre capacité de désendettement est de 18 années, ce qui n’est pas vraiment glorieux, mais témoigne d’une légère amélioration de nos comptes.
Bien sûr il n’y a pas de miracle. Cette amélioration des comptes s’explique par deux facteurs principaux : la hausse des impôts (+4,9% en 2009, soit 28 millions € supplémentaires prélevés sur les contribuables) et une austérité budgétaire qui ne dit pas son nom mais qui commence à poser de sérieux problèmes au sein des services municipaux.
La restructuration de l’administration municipale (RGPP) tente de répondre à ce défi de la baisse continue des moyens, mais beaucoup d’efforts restent à faire pour rendre la gestion des ressources humaines plus transparente et redonner de la motivation à un personnel confronté à des conditions de travail de plus en plus difficiles.
D’autres facteurs conjoncturels expliquent la légère amélioration de nos comptes. Les taux d’intérêt sont historiquement très bas et pour une ville endettée comme la nôtre, cette situation entraîne une économie de plus de 10 millions d’euros, comme l’indique votre rapport. Bien évidemment le mouvement inverse peut arriver à tout moment et l’addition serait alors extrêmement lourde … 1 point de hausse des taux d’intérêt entraînera 7 à 8 millions d’euros de frais financiers supplémentaires. Espérons que malgré la politique économique et sociale désastreuse de ce gouvernement, la signature de notre pays reste crédible dans les prochaines années sinon notre ville en subira directement les conséquences …
Le mini plan de relance réalisé par le gouvernement a permis aussi à notre commune d’encaisser 2 années de FCTVA soit 21 millions supplémentaires. Mais cette avance de trésorerie est un fusil à un coup et dès cette année, nous reviendrons à la normale.
Les effets de la crise, nous les constatons néanmoins avec une évolution préoccupante de –30% des droits de mutation (31,6 M€ en 2008 et 21,9 en 2009), alors que M. Tourret nous affirmait encore il y a quelques mois que tout allait bien de ce côté là !
Le niveau de nos investissements en 2009 (208 millions) est effectivement le même qu’en 2008 (207 millions), mais je note qu’il atteignait 246 millions en 2007 soit une baisse de plus de 20% en 2 ans…
Enfin notre endettement baisse symboliquement de 1 million d’euro par rapport à 2008 et atteint (fin 2009) 1 milliard 849 millions € soit 2180€ par habitant (nouveaux nés compris !). Et comme la dette de MPM atteint 1 milliard 250 millions, chaque marseillais doit aujourd’hui plus de 3600€ aux banquiers de la ville !
Pour résumer mon propos, si nous savons tous que la situation financière de notre ville est extrêmement tendue, l’année 2009, grâce à la hausse des impôts et la rigueur budgétaire, a amené une légère amélioration de nos comptes. Vous avez néanmoins décidé d’augmenter à nouveau les impôts en 2010 de +2,9% (après avoir évoqué +4,9%), ce qui montre bien que la situation est loin d’être maîtrisée…
J’ai peur en effet que cette hausse continue de la fiscalité s’accentue encore dans les prochaines années. J’ai déjà évoqué la hausse des taux d’intérêt qui interviendra forcément (car nous sommes à l’heure actuelle à un plancher) et elle nous coûtera au bas mot 10 à 12 millions € de plus par an.
Je dois bien évidemment évoquer ici la suppression de la Taxe Professionnelle, fausse bonne idée, dont le gouvernement s’aperçoit aujourd’hui qu’elle va lui coûter beaucoup plus cher que prévu et qui va s’empresser de faire payer les collectivités à sa place.
J’ajouterai bien évidemment la réforme des collectivités qui empêchera les financements croisés dans de nombreux domaines, ce qui privera la commune d’un certain nombre de ressources externes.
Il y a aussi le super plan d’austérité que concocte le gouvernement pour le budget 2011 et les suivants. Gel des dotations aux collectivités, baisse de l’ensemble des crédits publics pour l’école, les crèches, l’action sociale, la politique de la ville, les transports, le logement… voilà ce qui attend nos concitoyens et voilà ce qui vous conduira forcément à augmenter à nouveau les impôts dans les années à venir (et vous ne serez pas les seuls !).
Il paraît même que les bénéficiaires du bouclier fiscal risquent d’être touchés par l’austérité qui s’annonce ce qui démontrerait un courage inouï de la part de ce gouvernement. Je n’ose imaginer qu’il en sera de même pour les restaurateurs qui ont eu droit à 2,5 milliards d’allègements d’impôts avec les brillants résultats que nous connaissons…
Alors que nos ressources financières vont stagner voir diminuer, M. Le Maire continue imperturbablement à nous annoncer de grands évènements et d’énormes chantiers : Reconstruction du stade pour plus de 200 millions €, MUCEM pour 175 millions, Friche de la Belle de Mai pour 50 millions, rénovation du Musée à Longchamp, semi-piétonnisation du Vieux Port… les annonces se succèdent mais les plans de financement restent flous. Voilà des années que nous vous demandons de mettre en place un plan de programmation pluriannuel de nos investissements qui permettrait à tout le monde d’y voir un peu plus clair sur ce qui est faisable ou non.
Cet exercice, dans la conjoncture actuelle, est plus que jamais nécessaire. Mais il démontrerait aussi que certaines de vos annonces sont peut être un peu hasardeuses, ce qui explique que vous n’en voulez pas.
Les années qui s’annoncent seront à coup sûr plus difficiles pour notre métropole et surtout pour ses habitants les plus modestes… L’action publique est aujourd’hui remise en cause dans tous les secteurs alors que chômage, pauvreté, précarité et leur corollaire, l’insécurité, s’amplifient dans nos quartiers. Et ce ne sont pas les partenariats privés (si chers à notre gouvernement…) qui apporteront des postes d’éducateurs, de policiers, d’instituteurs ou d’assistante maternelles…
D’ailleurs M. Fillon vient de nous avertir en expliquant, il y a quelques jours, « le temps des efforts est devant nous » !
On ne saurait être plus clair et nos concitoyens qui souffrent depuis des années apprécieront cette perspective. « Ensemble tout est possible » nous répétait M. Sarkozy et je rajouterai aujourd’hui « même le pire » !
En attendant, nous nous abstiendrons sur ce compte administratif 2009.